Harper, Trudeau, même combat
Montréal, le 17 novembre 2016 — Le projet de loi C-29, portant exécution de certaines dispositions du budget, qui prévoit notamment modifier la Loi [fédérale] sur les banques permettrait aux banques de se soustraire à l’application des lois du Québec en matière de protection des consommateurs.
Selon l’article 131 du projet de loi fédéral C-29, qui a été récemment proposé à la Chambre des communes par le gouvernement Trudeau, la Loi sur les banques (telle que modifiée par C-29, notamment par l’ajout de l’article 627.03, y compris son paragraphe 2…) aura prépondérance « sur les dispositions des lois et règlements provinciaux relatives à la protection des consommateurs et aux pratiques commerciales visant ceux-ci ».
Objet
627.03 (1) La présente partie a notamment pour objet d’établir un régime complet et exclusif pour encadrer les relations des institutions avec leurs clients et le public relativement aux produits et services bancaires, et ce, afin :
- de fournir aux clients et au public une protection uniforme à l’échelle nationale;
- de permettre aux institutions d’exercer leurs opérations bancaires de façon cohérente et avec efficacité à cette échelle;
- d’assurer l’uniformité dans la supervision des institutions et le contrôle d’application des dispositions relatives à la protection des clients et du public.
Prépondérance
(2) Sauf disposition contraire prévue sous son régime, la présente partie vise à avoir prépondérance sur les dispositions des lois et règlements provinciaux relatives à la protection des consommateurs et aux pratiques commerciales visant ceux-ci.
Autrement dit, une banque canadienne ou internationale ne pourrait plus être poursuivie au Québec sur la base de la Loi sur la protection du consommateur (LPC) du Québec par rapport à des produits et services qu’elle vend à des épargnants du Québec.
Selon le coordonnateur et porte-parole du Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC), Willie Gagnon, qui est aussi président du conseil d’administration d’Option consommateurs, un tel recul en matière de défense des consommateurs et de compétence législative civile serait tout simplement « ahurissant ».
En 2012, le MÉDAC s’était prononcé sur le même sujet, dans le cadre des consultations sur le Projet de loi C-38 du gouvernement Harper, projet de loi qui était lui aussi susceptible de soustraire les banques à l’application de la LPC et du Code civil du Québec.
« Il s’agit essentiellement d’une matière de droit civil et le droit civil a 400 ans au Québec », avait alors affirmé Willie Gagnon. Exempter les banques de l’obligation de respecter le droit civil en place allait créer un « vide juridique » qu’il faudra nécessairement combler par la suite avec « Du droit civil fédéral? », s’interrogeait-il à cette époque. Un « droit civil fédéral » qui n’existe pas et qui remettrait en cause le fondement même de la constitution, constitution qu’aucun gouvernement ne veut ouvrir depuis très longtemps.
Willie Gagnon ajoutait alors craindre pour les consommateurs du Québec que les protections de la LPC ne puissent plus s’appliquer aux banques et autres institutions financières qui vendent des produits et services financiers au Québec.
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