Planche de salut de la durabilité du capitalisme
17 septembre 2020
Dominique Lemoine
Soit les sociétés par actions s’entichent du modèle de capitalisme de parties intéressées, soit elles devront vivre avec plus de lois qui réglementent leurs décisions.
Martin Lipton, auteur et associé fondateur du cabinet new-yorkais d’avocats-conseil Wachtell, Lipton, Rosen & Katz, en vient à cette conclusion dans un texte publié sur le forum de l’école de droit de l’Université Harvard sur la gouverne d’entreprises et la réglementation financière. Son texte se termine par une invitation à s’informer sur comment « empêcher la législation » et comment « sauver le capitalisme américain ».
À son avis, la doctrine Friedman selon laquelle la responsabilité sociale des sociétés par actions n’est que de toujours accroître les profits des actionnaires a servi de fondation intellectuelle au court-termisme, aux offres publiques d’achat hostiles, à de l’extorsion par des investisseurs prédateurs, au commerce d’obligations à haut risque, à l’érosion des protections pour les employés, ainsi qu’au laisser-faire environnemental et social.
En conséquence, selon Lipton, les dommages environnementaux et sociaux à long terme du capitalisme à vocation unique sont devenus « impossibles à ignorer » à partir de la crise de 2008 et de plus en plus de dirigeants politiques adhèrent à un capitalisme de parties intéressées, tandis que de grands et petits investisseurs se soucient davantage des effets des inégalités économiques et des injustices sociales sur la durabilité de leurs rendements et sur le sort d’autrui.
Une intervention imminente de l’État comme argument ultime
Par contre, Lipton fait aussi remarquer que des dirigeants d’entreprises, des économistes et des avocats résistent quand même encore et toujours à ce « nouveau » paradigme.
Selon Lipton, les C. A. et les hautes directions réfractaires auront avantage, surtout dans le contexte du dérangement pandémique, à mieux comprendre les parties déterminantes de la création de valeur à long terme, de même qu’à adopter une vision d’ensemble des interdépendances et des valeurs de ces parties concernées.
Seulement ainsi, toujours selon Lipton, les sociétés par actions pourront éviter de se voir imposer des lois qui décideront à leur place de leurs raisons d’être et de leurs valeurs.
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