Mille et un échappatoires pour 60 sociétés ouvertes du Canada
24 novembre 2017
Dominique Lemoine
Les 60 plus grosses sociétés ouvertes du Canada détiendraient plus de 1000 filiales ou sociétés affiliées qui sont liées à des paradis fiscaux connus, selon l’organisme Canadiens pour une fiscalité équitable.
L’organisme dévoile un rapport intitulé Bay Street and Tax Havens: Curbing Corporate Canada’s Addiction, qui s’intéresse à l’étendue de l’obsession du milieu des affaires du Canada pour les paradis fiscaux et à des ripostes gouvernementales potentielles.
Selon l’analyse rapportée, seulement quatre des soixante plus grosses sociétés ouvertes qui sont inscrites à la Bourse de Toronto n’auraient aucune filiale dans des paradis fiscaux connus.
Dollars « stationnés » dans des comptes extraterritoriaux
« Les statistiques sur les activités des filiales à l’étranger montrent très peu d’employés. Aux Bermudes, par exemple, une filiale rapporte 30,6 milliards de dollars canadiens mais seulement 35 employés », explique l’auteure du rapport. À son avis, cela démontre que des sociétés écrans existent bel et bien, contrairement à ce que prétendent des entreprises mises sur la défensive.
De plus, l’investissement canadien direct à l’étranger dans des paradis fiscaux connus aurait atteint 284 milliards de dollars en 2016, ce qui représenterait une perte de revenus d’entre 10 et 15 milliards de dollars pour les gouvernements du Canada, et en conséquence moins de services publics ou plus de taxes et d’impôts pour les individus, sans qui les profits des sociétés n’existeraient même pas.
Légal mais illégitime
Selon l’auteure, le problème est que les entreprises qui sont mises sur la défensive ont souvent raison quand elles disent que leur habitude est conforme à la loi. L’Agence canadienne du revenu serait donc pour l’instant impuissante même en haussant ses budgets de conformité.
« Nous avons besoin d’une réforme de la loi relative à l’impôt sur les bénéfices des sociétés qui rendra illégal d’utiliser un paradis fiscal pour évitement ou évasion fiscal », dit-elle.
Le rapport recommande aussi de mettre en oeuvre un test de substance économique pour les filiales extraterritoriales, de plafonner les paiements d’intérêt à des filiales extraterritoriales et de renégocier les traités fiscaux du Canada avec des paradis fiscaux pour s’assurer de l’existence d’un plancher de taxes et impôts payés.
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