Photo : iStock Le taux de représentation féminine au sein des conseils d’administration se chiffrait à 26,7 % au 19 avril.
La représentation féminine avance à pas feutrés
Seulement 13 % des entreprises canadiennes se sont dotées d’objectifs pour diversifier les postes de haute direction
25 avril 2017
Gérard Bérubé, Le Devoir
La réglementation canadienne aura bientôt trois ans et la représentation féminine au sein des conseils d’administration avance, mais à pas toujours feutrés. Et les entreprises sont encore nombreuses à ne pas se doter d’engagements de mixité pour leur haute direction.
Louise Champoux-Paillé, administratrice auprès de plusieurs sociétés, revient avec un nouveau bilan, quelque trois ans après l’application de la réglementation, le 31 décembre 2014. « Ce troisième bilan permet de constater une amélioration constante, mais légère sur les différents éléments suivants : nombre de femmes siégeant aux conseils d’administration, nombre d’entreprises se dotant d’une politique de diversité et nombre d’entreprises comptant trois administratrices et plus. Soulignons également que, parmi les candidatures proposées d’administrateurs, 43 % sont féminines, ce qui s’inscrit dans la tendance observée depuis les dernières années », résume l’ex-présidente du Cercle des administrateurs de sociétés certifiés.
Légère amélioration
Selon les données venant des plus importantes entreprises canadiennes inscrites en Bourse, le taux de représentation féminine au sein des conseils d’administration se chiffrait à 26,7 % au 19 avril dernier, contre 24,4 % en 2016 et 20,7 % en 2014. Pour les postes de haute direction, la représentativité est qualifiée de faible, à 21 % au dernier décompte. Mme Champoux-Paillé constate également que près de 30 % des entreprises n’ont toujours pas de politique pour accroître la présence féminine au sein de leurs conseils d’administration. Et peu se sont dotées d’objectifs pour les postes de haute direction, soit 13 % comparativement à 40 % pour les postes d’administrateurs.
Soulignons qu’au Canada, les autorités de réglementation en valeurs mobilières ont retenu l’approche de la divulgation selon la formule « se conformer ou s’expliquer ». Les entreprises sont ainsi devant un engagement moral mais non contraignant auprès des actionnaires et des investisseurs, avec une obligation de transparence s’étendant à la haute direction.
L’administratrice doute de l’efficacité d’une telle approche et se demande s’il ne faudrait pas, plutôt, privilégier les quotas, disons autour de 40 %. « Le Québec a favorisé cette voie pour ses sociétés d’État de grande taille en 2006 et a obtenu après cinq ans, les résultats souhaités. La France, la Norvège, le Danemark et la Suède ont également atteint une représentation féminine supérieure avec une stratégie de quotas », souligne Mme Champoux-Paillé. « L’expérience actuelle de la réglementation canadienne requiert que nos autorités réglementaires et nos gouvernements soient plus fermes et demandent aux dirigeants de nos organisations d’accroître leurs efforts en l’inscrivant dans une politique nationale de parité. » L’étude montre que le pourcentage de femmes dans les conseils d’administration d’entreprises dotée d’une politique écrite de mixité atteint 28,7 % contre 22,2 % dans les conseils d’administration sans politique.
Parmi les autres observations, l’étude indique que 43 % des nouveaux candidats proviennent de l’extérieur du Canada, ce qui reflète l’internationalisation des grandes entreprises. Aussi, les résidents québécois sont peu présents dans les nouvelles candidatures d’administrateur. « Cette situation peut s’expliquer par le fait que le recrutement s’effectue de plus en plus par des cabinets ayant leurs principales places d’affaires à Toronto et que les talents québécois y sont moins connus. Notons de plus la quasi-disparition de l’utilisation par certaines grandes entreprises du critère de représentation provinciale qui favorisait la nomination par région ou province », a précisé Louise Champoux-Paillé.