Des investisseurs pourront exercer les votes de leurs FNB chez BlackRock
14 octobre 2021
Dominique Lemoine
Des investisseurs institutionnels qui détiennent un compte chez BlackRock pourront voter à leur guise ou en ayant recours à des cabinets-conseils en votation lors des assemblées annuelles des entreprises dont ils détiennent des actifs via certains produits indiciels de placement gérés et commercialisés par l’entreprise.
L’agence de presse Reuters rappelait le 7 octobre dernier qu’un gestionnaire de portefeuille comme BlackRock vote habituellement au nom de ses clients qui ont investi dans les fonds qu’il propose et qui sont composés d’actions qui incluent des droits de vote.
La décision de BlackRock pourrait exposer certaines entreprises à une plus forte opposition de la part d’actionnaires dissidents, tandis que plus d’investisseurs considèrent exiger des comptes aux conseils d’administration, notamment au sujet des impacts sociaux des opérations, selon des experts dont les propos sont rapportés par Reuters.
Des directions vont trouver plus difficile de faire passer des décisions aux votes des actionnaires, puisque des investisseurs institutionnels plus exigeants que BlackRock en matière de gouvernance ou de rémunération, par exemple des caisses de retraite ou des fondations, vont user davantage qu’auparavant du droit de s’exprimer, selon un expert.
Refiler une patate chaude pour attendrir la SEC
« Traditionnellement, la firme [BlackRock] et ses rivales [State Street et Vanguard] s’en remettaient aux recommendations de vote des entreprises concernant les votes des actionnaires, mais ceci a commencé à changer », par exemple avec l’opposition à l’élection de certains administrateurs et avec l’appui à des propositions climatiques, même si BlackRock vote encore 95 % du temps en appui à la direction.
La stratégie de BlackRock et de son chef de la direction, Larry Fink, pourrait donc être de transférer un trop-plein de pouvoir aux gros clients, dans un contexte où son pouvoir, sa taille et sa complaisance sont décriés, selon un texte publié par le New York Times, et où il est surveillé de près par la U.S. Securities and Exchange Commission, qui menace d’exiger des grands gestionnaires d'actifs la divulgation de plus d'informations au sujet de leurs critères de votation.
« Au cours des dernières années, BlackRock a été en même temps critiqué pour avoir trop d’influence et pour ne pas l’utiliser assez pour forcer plus de changements dans les entreprises dans lesquelles il investit. Ça permettra d’affirmer qu’ils remettent leur pouvoir de votation entre les mains de détenteurs d’actifs bienfaisants et de détourner quelques reproches », selon le texte du NYT.
Selon des partisans de l’engagement actionnarial, quelle que soit la motivation de BlackRock, diviser une partie du gros morceau du pouvoir de votation contrôlé par les plus gros gestionnaires d’actifs est une bonne affaire pour pouvoir obtenir plus de changements des plus grosses entreprises.
À l’avant-garde de State Street et Vanguard?
Il se peut que les gestionnaires de fonds rivaux de BlackRock évoluent dans la même direction pour les investisseurs basés aux États-Unis, selon un professeur de l’Université de Pennsylvanie cité par Reuters.
Selon The Wall Street Journal, Vanguard, le deuxième plus gros gestionnaire de fonds au monde après BlackRock, a transféré en 2019 une partie de son pouvoir de votation à des gestionnaires externes de ses fonds d’actions actifs, de manière à ce qu’ils puissent voter séparément des fonds gérés par Vanguard lui-même.
Accessible aux investisseurs individuels d’ici?
BlackRock explore les possibilités d’élargir son offre d’options de votation à plus d’investisseurs et de produits, incluant des investisseurs individuels dans des fonds indiciels négociables en bourse ou dans des fonds communs de placement indiciels, selon le WSJ.
« La plupart des gens voient leurs investissements comme étant des mécanismes d’engagement, pas seulement comme étant des mises pour gagner gros ou pour obtenir des rendements plus élevés », selon l’investisseur privé James McRitchie, cité par Reuters.
Selon la lettre envoyée par BlackRock à ses clients, les options de votation sont conçues pour leur permettre d’avoir davantage leur mot à dire lors de votes sur les orientations des entreprises ou sur des propositions d’actionnaires quand cela est important pour eux.
Pour l’heure, selon Reuters, le choix de voter soi-même ou non est offert à des investisseurs institutionnels qui participent à certaines stratégies indicielles par l’entremise de comptes gérés, ainsi qu’à certains fonds mis en commun en Grande-Bretagne et aux États-Unis.
Le pouvoir de votation récupéré par ces clients de BlackRock pourrait concerner environ 40 % des actifs indiciels gérés par BlackRock.
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