Power et la BMO invités à financer le MÉDAC
21 septembre 2011
Caroline Pailliez, Argent
Les dirigeants de Power Corporation et de la BMO avaient accepté de participer au financement du Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC) lorsque celui-ci a perdu l’aide de l’Autorité des marchés financiers (AMF), et ce, malgré la lutte acharnée du Robin des banques Yves Michaud.
Les deux institutions, pourtant souvent sujettes aux critiques du MÉDAC, s’étaient en effet montrées favorables à l’idée de financer une éventuelle fondation pour assurer la pérennité des activités d’éducation de l’organisme, a révélé mercredi Claude Béland, président démissionnaire du mouvement.
La proposition de l’ancien président d’inviter les institutions financières à financer le MÉDAC a toutefois créé un schisme au sein du conseil.
Certains y voient carrément un conflit d’intérêts. « Il est hors de question que le MÉDAC recherche du financement auprès d’institutions financières ou d’autres entreprises cotées en Bourse. Notre organisme se veut le défenseur des petits actionnaires. Si financement il y a, il viendra directement du public », a déclaré Yves Michaud, le fondateur de l’organisme.
Pourtant, le MÉDAC continue à sonder le milieu des affaires. « Nous discutons encore de la forme que pourrait prendre cette fondation, mais c’est certainement une proposition envisagée. De nombreuses personnalités, qu’ils viennent d’institutions financières, d’ordres professionnels ou du milieu public, ont déjà montré un grand intérêt dans le projet », a expliqué Normand Caron, conseiller en formation du MÉDAC.
Pour les tenants de l’aide provenant des institutions financières, le mur de Chine entre les activités de formation et d’activisme est suffisant pour assurer l’indépendance de l’organisme.
Soucis de rémunération
Une fondation arriverait pourtant à point nommé. Le MÉDAC subit des pressions financières très fortes depuis que l’AMF a décidé, en mars 2011, de ne pas renouveler sa subvention annuelle de 100 000 $. L’organisme dispose maintenant des cotisations de ses quelque 2000 membres, à raison de 35 $ par personne, d’une participation de 40 000 $ de certains partenaires et d’un versement de l’AMF de 25 000 $ pour soutenir son administration quotidienne.
« Nous avons dû réduire considérablement notre offre de cours cette année. Sans les subventions de l’AMF, les prix d’adhésion pouvaient facilement dépasser les 400 $, ce qui était bien trop élevé pour nos membres », a indiqué M. Caron.
Pour assurer la pérennité à long terme du programme de formation, l’organisme devrait se doter d’une base en capital de 3 millions $ au moins. Le personnel administratif espère trouver rapidement une dizaine de partenaires prêts à faire des donations de 300 000 $ chacun.
Le MÉDAC déposera, la semaine prochaine, un projet auprès de l’AMF pour obtenir des subventions pour 2012. Une partie de l’argent servira à mettre sur pied cette fondation, a ajouté M. Caron.
Un historique de critiques
Le MÉDAC n’avait pas mâché ses mots, en mars 2010, lorsqu’il avait demandé aux actionnaires de la Banque de Montréal de voter contre la rémunération de son dirigeant, Bill Downe, jugée bien trop élevée comparativement aux résultats de l’entreprise.
Avec un salaire d’environ 7,6 millions $, le mouvement avait calculé un ratio d’équité salariale de 63 %, ce qui signifie que le banquier gagnait environ 63 fois plus que le revenu moyen d’un de ses employés. Le MÉDAC encourage les institutions à ramener leur ratio aux alentours de 30.
Il faut dire que le premier volet de la mission du MÉDAC, qui se consacre à l’éducation financière de ses membres, touche certaines cordes sensibles, notamment Jacques Ménard, président du conseil d’administration de la Banque de Montréal et vice-président du Groupe de travail sur la littératie financière établi par le ministre des Finances à Ottawa.
« M. Ménard a sillonné le Canada pour évaluer les besoins en terme de littératie financière. C’est une des personnes qui possède le mieux ce dossier. Si nous pouvions lui décerner le titre de membre du conseil d’administration émérite de la fondation, ce serait une carte gagnante pour le mouvement », a indiqué M. Caron.
Normand Caron a été directeur du service de la formation puis vice-président développement de l’actionnariat et de la formation pour le Fonds de solidarité FTQ.
Power Corporation n’échappe pas non plus aux critiques du MÉDAC. Les deux organismes s’affrontent depuis des années en cour alors que le MÉDAC réclame, au nom des petits actionnaires, de pouvoir consulter les comptes de la filiale Gesca du géant financier. Power a perdu la bataille en Cour supérieure.
Un porte-parole de la BMO a confirmé qu’il y a bel et bien eu des discussions entre Jacques Ménard et le MÉDAC portant sur le financement de l’organisme. Power Corporation, de son côté, n’a pas souhaité faire de commentaires.