Éduquer les Québécois en finances prendra une génération
18 mai 2011
Michel Munger, Argent
Les Québécois demeurent ignorants en matière de finances et leur éducation prendra une génération. C’est le message du nouveau patron de l’Autorité des marchés financiers (AMF), Mario Albert. Mario Albert
Le haut dirigeant a fait, mercredi, sa première sortie publique depuis qu’il a pris le relais de Jean St-Gelais à titre de PDG de l’organisme de réglementation.
Devant le Cercle de la finance internationale de Montréal, Mario Albert citait les données d’un récent sondage SOM. L’enquête indique que 80 % des Québécois ne détectent pas les risques lorsqu’ils font un placement. De plus, un rendement de 2 % par mois leur semble réaliste, même si cela signifie des gains 24 % sur un an.
« Nous ne pouvons pas changer le comportement et la connaissance d’une population en un an ou deux, estime M. Albert. Il faut penser à une génération complète. L’erreur à ne pas faire est de baisser les bras. Retroussons nos manches, année après année, pour lancer des initiatives d’éducation à grande échelle. Nous l’avons fait [en diffusant du contenu] dans les journaux Gesca et à la chaîne Argent. À long terme, nous obtiendrons des résultats. »
S’il veut mettre l’accent sur l’éducation financière, M. Albert défend la décision de l’Autorité d’amputer de 100 000 $ le financement du Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC).
« Le Fonds d’éducation pour la saine gouvernance a un comité qui passe les projets en revue, réagit-il. La décision de ne pas reconduire le financement du MÉDAC a été prise par ce comité. Le MÉDAC avait déjà été informé des réticences du comité de sélection sur son projet. S’il peut le modifier, il nous fera plaisir de l’examiner de nouveau. »
Par ailleurs, Mario Albert a joué de prudence en commentant la situation du Groupe TMX. Il a refusé de dire s’il privilégiait l’offre de la Bourse de Londres ou celle de Maple. De plus, il est resté sur ses gardes sur son droit de veto, qui sert à protéger les produits dérivés de la Bourse de Montréal.
« Nous aurons un mot à dire une fois que les actionnaires de TMX détermineront quelle proposition ils souhaitent accepter, indique le PDG. Nous n’avons pas à nous prononcer entre l’offre de Londres et celle des banques canadiennes. »
Mario Albert refuse aussi de se jeter à l’eau sur une éventuelle réforme du Fonds d’indemnisation des services financiers. Ce fonds n’avait pu couvrir les victimes du scandale Norbourg. Un groupe de travail a déjà proposé de mettre sur pied une assurance payée par tous les investisseurs.
« Je ne dis ni oui ni non à cette idée, répond-il. Nous tiendrons des consultations et examinerons les différentes options proposées. Il est prématuré de tirer des conclusions sur une formule. »
Des salaires trop bas?
Celui qui s’est joint à l’AMF en 2007 avoue qu’il a des trous à combler au sein de l’organisme. L’équipe juridique doit embaucher une dizaine de personnes afin mener tous ses dossiers d’enquête en cours.
De plus, l’AMF aimerait mettre la main sur des spécialistes des dérivés, ainsi que des actuaires. Toutefois, la tâche s’avère ardue.
« Les salaires payés dans l’industrie sont très élevés, explique M. Albert. Il est difficile d’être concurrentiel car le salaire maximal chez nous est d’environ 120 000 $. Mais il y a d’autres choses que nous pouvons faire, comme recruter des actuaires dès leur première année de travail. »