AG 2010 : les sociétés du CAC 40 recomposent leurs conseils
15 avril 2010
Mathieu Rosemain, Les Échos (France)
Le leader mondial du luxe, LVMH, ouvre aujourd’hui la saison 2010 des assemblées générales des sociétés du CAC 40. Leurs actionnaires devront se prononcer sur nombre de nominations de nouveaux administrateurs (-rices).
Elles aussi offriront peut-être le signe que la crise arrive à son terme. Les assemblées générales annuelles des sociétés du CAC 40 débutent aujourd’hui dans une atmosphère beaucoup moins morose que l’an passé. L’indice de référence a enregistré hier un nouveau record en 2010 et les principaux protagonistes du séisme boursier de 2008, les banques, retrouvent des couleurs de part et d’autre de l’Atlantique. C’est le leader mondial du luxe LVMH (propriétaire des « Echos ») qui ouvre le bal cette année. Peu de chances que ses actionnaires se montrent hargneux : le groupe dirigé par Bernard Arnault vient de publier un chiffre d’affaires en forte hausse au premier trimestre et les perspectives sont bonnes. Aucune des résolutions soumises au vote de l’assemblée ne devrait poser problème, mais l’une d’entre elles, la nomination de l’historienne Hélène Carrère d’Encausse comme administratrice, illustre le phénomène actuel de recomposition des conseils des 40 champions français. Vallourec, Vivendi, AXA ou encore PPR ont nommé de nouveaux administrateurs ou proposé des résolutions en ce sens. Leur point commun : elles font la part belle aux femmes, jusqu’ici nettement sous-représentées dans les conseils d’administration des grandes valeurs françaises.
Chez LVMH, la nomination d’Hélène Carrère d’Encausse, quatre-vingt-un ans, porterait à deux le nombre de femmes sur dix-neuf administrateurs, aux côtés de Delphine Arnault, fille du dirigeant. C’est encore loin du seuil de 40 % inclus dans deux propositions de loi aujourd’hui en débat au Parlement. Mais cette résolution et les nombreuses sollicitations reçues par les administratrices professionnelles ces jours-ci suggèrent que les grands groupes anticipent l’adoption d’un quota par les élus nationaux. D’autant que ces incitations s’accompagnent d’une attention particulière portée depuis les débuts de la crise sur le cumul des mandats de la part de plusieurs hauts dirigeants.
Changements de gouvernance
Cette situation en ferait presque oublier le sujet phare des AG de 2009 : la rémunération des grands patrons. Les attributions de stock-options ou d’actions gratuites ne semblent plus préoccuper les petits porteurs autant que l’an passé. C’est peut-être, là aussi, la conséquence de l’amélioration du paysage économique de nombre de grandes entreprises, institutions - financières en tête. Celles-ci se gardent bien, cependant, d’affirmer que l’avenir est radieux. D’où cette autre tendance de fond affichée par plusieurs des 40 champions : la concentration des pouvoirs à la tête de l’exécutif. La Société Générale y a eu recours, en réunissant les rôles de président et de directeur général dans les mains de Frédéric Oudéa. Vinci fait de même et proposera le 6 mai à ses actionnaires le cumul des mêmes fonctions au bénéfice de Xavier Huillard. Pour donner à Henri de Castries les mêmes responsabilités, AXA va même jusqu’à changer son mode de gouvernance, en proposant de passer d’une société avec directoire et conseil de surveillance à une société avec conseil d’administration, la première interdisant de fait la possibilité de cumuler les rôles de président et de dirigeant opérationnel.
Les sociétés concernées justifient ces changements de mode de gouvernance en mettant en avant la nécessité d’accroître l’efficacité des processus de décision en période de crise. C’est cette même nécessité qui motive, d’ailleurs, le raider américain Guy Wyser-Pratte à l’égard de Lagardère. Cet actionnaire minoritaire a tout bonnement proposé de revoir les statuts du groupe français, aujourd’hui société en commandite par actions (SCA), dont il juge le conseil « antidémocratique et médiéval. » Une résolution vertement rejetée par la gérance de Lagardère.