Fronde contre le contrôle familial de Bombardier

L’entreprise veut garder sa structure d’actionnariat

Pierre Beaudoin et Laurent Beaudoin, petit-fils et gendre du fondateur de l’entreprise, lors de l’assemblée annuelle, en mai 2018.
Photo d’archives, Ben Pelosse

12 avril 2019
Sylvain Larocque, Le Journal de Montréal

Deux influentes firmes américaines mettent leur poids derrière une proposition du Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC) visant à mettre fin au contrôle de Bombardier par la famille de son fondateur.

Les descendants de Joseph-Armand Bombardier détiennent à peine 12,2 % des actions de la multinationale, mais ils contrôlent 50,9 % des voix grâce à des actions de catégorie A dotées de 10 droits de vote chacune, soit 10 fois plus que les titres de catégorie B.

« Nous croyons que les droits de vote de chaque actionnaire devraient concorder avec leurs intérêts économiques et qu’un petit groupe d’actionnaires, qu’il s’agisse d’une famille ou non, ne devrait pas avoir de droits de vote différents de ceux des autres actionnaires », écrit Glass Lewis dans un rapport récent sur Bombardier.

De son côté, International Shareholder Services (ISS) estime qu’il est « justifié » d’appuyer la proposition du MÉDAC, y voyant une façon d’envoyer un message au conseil de Bombardier.

Pour appuyer sa démarche, le MÉDAC cite les politiques de plusieurs investisseurs institutionnels, y compris celle des Fonds Desjardins.

« Une brique et un fanal »

« Quand on a envoyé notre proposition, il y a eu une levée de boucliers chez Bombardier, raconte Willie Gagnon, coordonnateur du MÉDAC. On s’est fait recevoir avec une brique et un fanal. Mais ce qu’on veut, c’est qu’il soit possible d’en discuter. »

Le MÉDAC a décidé de s’en prendre aux actions multivotantes de Bombardier dans la foulée des nombreuses controverses qui ont secoué l’entreprise, dont la vente massive d’actions par des hauts dirigeants, l’an dernier, explique M. Gagnon.

« On n’est pas contre les actions à votes multiples, mais on trouve que ç’a fait son temps chez Bombardier », affirme-t-il.

Yvan Allaire, président du conseil de l’Institut sur la gouvernance, n’est pas surpris du soutien d’ISS et de Glass Lewis à la proposition du MÉDAC.

« Vision très américaine »

« Ce sont deux sociétés qui ont une vision très américaine des entreprises et qui transportent ça ici », lance M. Allaire.

« S’il n’y avait pas d’actions à droits de vote multiples, ça ferait longtemps que Bombardier aurait disparu, ajoute-t-il. Ç’aurait été acheté et dépecé. Le siège décisionnel serait rendu ailleurs. »

Bombardier « n’a aucunement l’intention de changer [sa] structure d’actionnariat », martèle un porte-parole, Olivier Marcil.

L’entreprise souligne que son conseil est composé « à près de deux tiers d’administrateurs indépendants » de la direction et de la famille. Rappelons que plusieurs grandes entreprises québécoises, dont Alimentation Couche-Tard, Québecor, Cogeco et Power Corporation, disposent d’actions multivotantes.

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