Pourquoi Bombardier n’a pas eu le contrat du REM?

Le REM, le Réseau express métropolitain, est un projet bâti par et pour la Caisse de dépôt et placement du Québec. Si la Caisse a déployé un projet qui représente une solution valable en matière de transport en commun, en concordance avec les pouvoirs publics, l'institution a aussi structuré son plan pour arriver à faire de l'argent.

Normalement, le transport en commun n’est pas rentable. C’est ce que nous rappelait, tout récemment à RDI économie, Florence Junca-Adenot, ex-pdg de l’Agence métropolitaine de transport. Mais, pour que la Caisse se lance dans une telle aventure, il doit y avoir un rendement acceptable au bout du compte.

C’est pour cette raison que le gouvernement du Québec a cédé le volant à la Caisse de dépôt pour développer une offre de transport efficace entre la rive sud, la rive nord et l’ouest de Montréal. Et c’est pour ça que le gouvernement du Québec ne cesse d’éponger l’essentiel des coûts supplémentaires qui n’ont pas été dévoilés dès le départ.

Depuis le jour 1, la Caisse a ajouté 280 millions à ses coûts, les faisant passer de 2,67 milliards à 2,95 milliards alors que les coûts engagés par le gouvernement du Québec sont passés d’une mise de départ de 1,283 milliard à des coûts engagés de près de 2,7 milliards en incluant l’investissement d’Hydro-Québec, la compensation de la plus-value foncière et une série de coûts supplémentaires qui ont été prévus dans le dernier budget.

De plus, pour s’assurer que le projet sera rentable, les gouvernements du Québec et du Canada ont accepté de céder leur part de rendement à la Caisse sur les premiers 8 % de gains annuels.

La Caisse, au coeur du débat politique

Alors, quand on voit le débat qui fait rage sur la décision de la Caisse de dépôt de ne pas choisir Bombardier Transport pour fabriquer le matériel roulant du REM, il est important de comprendre le contexte du projet. Québec a donné les clés du pouvoir à la Caisse et l’institution s’est donné une totale liberté dans ses choix : pas de minimum de contenu canadien, pas de préférence nationale, aucun engagement précis.

Vous comprenez bien : la Caisse fait simplement son travail pour tenter de développer un projet de transport collectif qui lui sera rentable. Si Bombardier avait fait une proposition qui avait permis à la Caisse de respecter ses objectifs financiers, Michael Sabia et son équipe auraient possiblement choisi le projet de Bombardier pour fabriquer le matériel roulant.

Il est intéressant, par ailleurs, de constater que la Caisse évalue que son placement dans Bombardier Transport n’est pas moins rentable en ne donnant pas le contrat du REM à Bombardier. Au contraire même, l’action de Bombardier remonte depuis quelque temps. Les résultats financiers meilleurs qu’attendu de l’entreprise, attribuables notamment à la hausse des revenus et du carnet de commandes de la division ferroviaire, a fait grimper l’action de 11 % jeudi. La Caisse fait de l’argent avec son investissement dans Bombardier, pas le contraire.

C'est au gouvernement de répondre de ses actes

C’est donc vers le gouvernement du Québec qu’il faut diriger nos questions. L’État a investi dans la C Series, a défendu le quasi-don de la C Series au groupe européen Airbus, c’est le gouvernement qui a donné les clés du projet du REM à la Caisse de dépôt et c’est Québec qui éponge une grande partie des coûts supplémentaires associés au projet.

Par le biais de la Caisse, il est bien possible que nos avoirs de retraite bénéficient du rendement du REM et de l’investissement dans Bombardier Transport. Mais, est-ce qu’en retour, les milliards injectés pour sauver Bombardier et la C Series vont finir par bénéficier à l’État, d’autant qu’une majorité des parts du projet appartiennent maintenant à Airbus? Et combien va coûter, à terme, le projet du REM pour le gouvernement du Québec?

Pourquoi Québec n’exige pas un contenu québécois minimal dans un contrat comme celui du REM? Est-ce que Québec s’assure de la protection des emplois à Mirabel quand on sait que des avions C Series seront bientôt construits en Alabama? Est-ce que Québec s’assure aussi de la protection des emplois à l’usine de La Pocatière?

Sur le plan des affaires, la Caisse de dépôt a de nombreux arguments pour expliquer le choix d’Alstom au lieu de Bombardier pour le matériel roulant du REM. Sur le plan politique et celui des finances publiques, le gouvernement doit s’assurer que l’utilisation des impôts des citoyens bénéficie à l’économie et aux travailleurs du Québec.

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