Interview (Fabrice Rémon) : « Les épargnants ne doivent pas avoir peur de demander réparation »
2 juin 2010
Les Échos
Deminor est un défenseur très actif des petits épargnants et des actionnaires minoritaires.
Rencontre avec son directeur général, Fabrice Rémon.
Spécialisée dans le conseil aux actionnaires minoritaires de sociétés cotées, Deminor France est aussi très présent auprès des actionnaires de sociétés non cotées, souvent familiales. L’intervention s’étend alors à la recherche d’informations, la valorisation de la participation, l’intermédiation voire l’obtention d’une solution négociée pour permettre à l’actionnaire minoritaire de céder ses titres. Les missions de Deminor se déroulent toujours dans un esprit de conciliation, l’usage des actions en justice n’est décidé qu’en ultime recours avec le concours d’un avocat. Deminor France peut également jouer un rôle de conseil pour toutes les questions qui touchent la gouvernance d’entreprise et intervient dans les grands débats qui concernent les actionnaires.
Fabrice Rémon, Directeur général de Déminor France, nous expose la manière dont Deminor traite les dossiers qui lui sont confiés.
Vous traitez notamment les dossiers Proximania, Natixis, Carrère… Est-ce que les risques augmentent aujourd’hui pour les petits actionnaires?
Fabrice Rémon : Les actionnaires doivent être très vigilants et plus particulièrement en cette période de turbulence des marchés. Certaines sociétés pourraient en profiter pour faire passer de mauvais résultats ou des nettoyages de bilan en imputant à tort la faute à la crise financière que nous traversons. Les préjudices supportés par les actionnaires des sociétés sur lesquelles nous travaillons trouvent généralement leurs sources dans les fausses informations et faux bilans. C’est certain que dans le cadre de Natixis, la crise financière actuelle ne fait que mettre en avant les incroyables dérives et erreurs de gestion de l’équipe précédente.
Que proposez-vous aux épargnants abusés par des comportements frauduleux des dirigeants d’entreprises dont certains n’hésitent pas à truquer la comptabilité?
Les épargnants ne doivent pas baisser les bras et se laisser impressionner par leurs supposés « conseillers commerciaux » de leur réseau bancaire qui, ne nous cachons pas, bien souvent n’y connaissent rien. Généralement, ils ne font qu’exécuter des instructions commerciales données par leur hiérarchie. Hélas, trop souvent les épargnants n’osent pas se révolter. Ils ne doivent pas avoir peur d’aller en justice pour demander réparation lorsqu’ils ont été abusés ou que les comptes communiqués étaient faux et que cela leur a procuré un préjudice. Je suis particulièrement choqué par ce qui s’apparente pour moi à de l’abus de faiblesse de la part de certains réseaux bancaires à l’égard de leurs clients.
Quel pourcentage de réussite avez-vous dans vos actions?
C’est très difficile à dire. Nous nous attachons à travailler sur des situations qui justifient réellement une réaction des investisseurs. La cause doit être juste à nos yeux et nous refusons toute agitation gratuite, même si certains investisseurs aimeraient bien nous voir intervenir dès qu’ils enregistrent la moindre perte. Nous faisons un très gros travail en amont pour bien comprendre la situation et privilégions la négociation, mais n’hésitons pas à faire intervenir un avocat s’il faut aller en justice. Cette façon de travailler depuis 20 ans fait que lorsque Deminor s’intéresse à un dossier, les différents intervenants savent que le dossier est sérieux et que nous avons beaucoup d’éléments en mains. C’est certainement pour cela que nous avons un bon taux de réussite.
Pouvez-vous aussi intervenir pour les sicav et fonds qui modifient leur gestion sans prévenir leurs porteurs, par exemple un fonds actions transformé en monétaire?
D’une façon générale, Deminor intervient à chaque fois qu’un investisseur est lésé dans ses droits et qu’il a été trompé. A fortiori, pour des modifications flagrantes de changement injustifié de gestion. Une de nos forces est de savoir regrouper tous les investisseurs qui nous le demandent. Ainsi, dans le dossier Madoff, Deminor International fédère près de 1200 investisseurs provenant des 5 continents. Cela nécessite la mise en place d’une équipe complète et pluridisciplinaire compte tenu de la complexité du dossier et peu de structures sont d’ailleurs à même d’offrir un tel service.
propos recueillis par Bernard le Court, Les Échos