Photo : Graham Hughes, La Presse canadienne
Les cochefs de la direction de Power Corporation, Paul Desmarais fils (gauche) et André Desmarais
Power s’oppose toujours au vote consultatif
20 avril 2017
Julien Arsenault, La Presse canadienne
Même si une proportion grandissante des actionnaires de Power Corporation semble désireuse d’avoir son mot à dire sur les salaires des membres de la haute direction du conglomérat financier, celui-ci continue à s’opposer à cette pratique.
Dans sa circulaire récemment déposée auprès des autorités réglementaires en vue de son assemblée annuelle du 12 mai à Toronto, Power Corporation offre une fois de plus une fin de non-recevoir à la proposition du Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MEDAC) visant l’implantation d’un vote consultatif sur la rémunération des hauts dirigeants.
L’an dernier, l’organisme avait récolté 18,74 % d’appuis, alors qu’en 2015 17,01 % des voix avaient été exprimées en faveur de cette initiative — qui a été adoptée par presque toutes les institutions financières au pays.
Selon le MEDAC, il s’agit de « pourcentages constants et élevés » lorsque l’on considère que les titres à droits de vote limités — détenus majoritairement par des actionnaires qui ne font pas partie de la haute direction — ne représentent que 45,93 % de l’ensemble des droits de vote rattachés aux actions en circulation du conglomérat.
« Il est contre-productif que leur seule solution pour exprimer un désaccord soit celle de vendre leurs actions, décision pouvant s’avérer coûteuse dans certaines occasions », fait valoir l’organisme.
Refus du conseil
De son côté, le conseil d’administration de Power Corporation recommande une fois de plus de voter contre la proposition du MEDAC, affirmant que « l’une des responsabilités principales du conseil » d’administration consiste à évaluer le rendement des patrons de la société.
« Les politiques de rémunération sont de plus en plus complexes et doivent tenir compte de plusieurs facteurs, écrit Power dans sa réponse. Le conseil estime que les administrateurs et le comité de rémunération de la société sont les mieux placés pour superviser les conditions de rémunération des hauts dirigeants. »
Sur cet aspect, le directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), Michel Nadeau, s’est rangé dans le camp du conglomérat financier.
Au cours d’un entretien téléphonique, M. Nadeau a rappelé que l’Institut estimait que le processus de consultation des actionnaires en matière de rémunération ne constituait pas la solution au problème « des abus des entreprises en matière de rémunération ».
« Ce dossier appartient au conseil d’administration des sociétés, a-t-il dit. Par contre, si les actionnaires sont mécontents, ils peuvent voter individuellement contre les membres du conseil qui siègent au comité de rémunération. »
Rémunération globale en hausse
Par ailleurs, pour l’exercice 2016, la rémunération totale de la haute direction de Power Corporation s’est établie à 27 millions de dollars, en hausse de 2 %. Cette somme comprend les salaires, primes, actions ainsi que les options d’achat d’actions versées par la Corporation Financière Power, la principale filiale du conglomérat.
L’an dernier, Power Corporation a vu son bénéfice net fondre d’environ 40 %, à 1,082 milliard, ou 2,33 $ par action. Cette performance s’explique en grande partie par une charge de 237 millions liée à une perte de valeur du placement de la société dans le cimentier LafargeHolcim.
La rémunération globale des deux cochefs de la direction de Power Corporation, Paul Desmarais fils et André Desmarais, a été respectivement de 6,77 millions et de 6,87 millions. Dans les deux cas, il s’agit de reculs d’au moins 10 %.
Ce ne sont toutefois pas les frères Desmarais qui sont les mieux rémunérés, mais plutôt le président et chef de la direction de la Financière Power, Jeffrey Orr. Pour l’exercice 2016, celui-ci a vu son salaire global s’établir à 11,22 millions de dollars, en légère baisse par rapport à 11,67 millions l’année précédente.
Par l’entremise d’une filiale, Power Corporation détient un investissement dans La Presse canadienne dans le cadre d’une entente commune avec une filiale du quotidien The Globe and Mail et l’éditeur Torstar.