Le New York Times et la diversité au C.A.
1er juin 2016
Yvan Allaire (IGOPP), Les Affaires
Nous l’affirmons haut et fort depuis au moins 2009. L’objectif d’assurer une forte présence des femmes aux conseils d’administration est une question d’équité et de principe!
Cet objectif n’a pas à être validé par des études empiriques qui démontreraient, au mieux, une corrélation entre le taux de participation des femmes au conseil et la performance économique des entreprises. Or, certains protagonistes d’une plus grande participation des femmes au conseil insistent pour appuyer leur revendication sur un tel argument. De nombreuses études ont été publiées affirmant avoir démontré les effets bénéfiques provenant de l’ajout de femmes au conseil.
Cet argument nous semble inapproprié et oiseux. D’abord, les études de cette nature sont toujours controversées, sujettes à de sérieuses réserves méthodologiques et conceptuelles. La performance économique des entreprises est le résultat de multiples facteurs; il est donc bien difficile d’isoler l’influence d’un facteur en particulier.
Puis, qu’arriverait-il si une étude bien faite (ou aussi mal faite que les autres) concluait que la participation accrue de femmes au conseil donne des résultats insatisfaisants ou concluait que cette variable n’a aucune influence sur la performance économique d’une entreprise? Devrait-on rebrousser chemin et arrêter les efforts entrepris pour faire progresser la participation féminine aux conseils?
Or, justement, le New York Times faisait état récemment d’une étude menée auprès des 100 plus grandes sociétés américaines par la firme Equilar. Cette société, grande spécialiste de la rémunération des dirigeants, rapporte qu’une présence accrue de femmes aux conseils est associée à une rémunération du PDG qui est de 15 % supérieur à ce qui est payé aux PDG d’entreprises dont le conseil est moins divers. (Gretchen Morgenson, « Where more women are on boards, executive pay is higher », NYT, May 27th 2016)
Encore une fois, cette étude n’a aucune valeur, ne prenant pas en compte la taille, la profitabilité et l’appartenance industrielle des sociétés, trois variables ayant une influence considérable sur les rémunérations des dirigeants. Pourtant le titre de l’article et sa lecture en diagonale pourraient susciter un doute sur la contribution de la diversité aux conseils d’administration.
Cette défaillance méthodologique est également manifeste dans les études aux conclusions plus positives sur les bienfaits de la diversité. Répétons-le : l’augmentation de la participation des femmes aux conseils d’administration de sociétés ouvertes doit être comprise comme une question de principe et d’équité et non pas comme une thèse devant être démontrée par des études empiriques.