Le Capitalien : ce que c’est

Normand Caron

Ne cherchez pas dans les dictionnaires, le terme « capit@lien » n’existe pas! Du moins, pas encore! Je l’ai carrément inventé, car je ne me suis jamais senti à l’aise avec celui de « capitaliste », trop associé dans ma tête à d’autres terminologies comme « profiteur », « possédant », « exploiteur »… et j’en passe!

Mes racines familiales, mes valeurs sociales issues de ma formation citoyenne et académique, mon implication syndicale et coopérative ont fait de moi un homme dit « de gauche », plus intéressé aux mécanismes de partage de la richesse qu’au processus de sa création. Tout au long des 45 années de ma vie professionnelle, je me suis lourdement investi dans une multitude de projets sociaux, politiques et économiques visant tous, à divers degrés d’intensité et d’efficacité, à affranchir le plus grand nombre possible de mes concitoyens des « règles du jeu » pures et dures du système capitaliste.

De nouveaux propriétaires

Par un curieux retour des choses (et peut-être y ai-je contribué à ma façon?), à la faveur d’une profonde mutation des économies occidentales, des millions de mes concitoyens, formés et motivés à s’affranchir des maîtres traditionnels de l’économie, sont devenus petit à petit d’importants bailleurs de fonds. Pendant un demi-siècle, ils ont épargné. Ils ont constitué et alimenté d’immenses réservoirs d’épargne collective, certains datant du début du siècle, comme les coopératives d’épargne et de crédit ou les mutuelles d’assurance, d’autres plus récents comme la panoplie de régimes d’épargne (retraite, études, actions…) sans oublier une innovation purement québécoise, les fonds de travailleurs. Si on additionne fin décembre 2013, la valeur des actifs sous gestion de l’ensemble de nos instruments financiers, tant du domaine public que privé, on dépassait 885 milliards de dollars, soit plus de 260 000 $ par ménage québécois.

Qui sont ces nouveaux propriétaires de l’économie, des entreprises, des moyens de production de biens et de services, créateurs de richesse? Vous et moi. Par notre patrimoine personnel et celui de nos caisses de retraite, nous sommes devenus les principaux fournisseurs de capitaux pour les gouvernements et les entreprises. Nous détenons la majorité des actions votantes et participantes d’un nombre important de grandes et moyennes entreprises à propriété canadienne ou québécoise. Partis de rien au tournant des années 1900, nous voilà devenus, un siècle plus tard de « nouveaux capitalistes », propriétaires d’un riche patrimoine de titres financiers diversifiés et rentables. En ce sens, je préfère de loin ce vocable de « capitalien » qui intègre à mes yeux, l’acte d’épargner et d’investir à un ensemble de valeurs éthiques, environnementales, sociales et communautaires.

L’objectif de ce blogue est double :

  • Faire le point régulièrement sur la santé financière de ces nouveaux « capitaliens » que nous sommes devenus. Quel est l’état de notre épargne patrimoniale? Dans quels conduits l’avons-nous logée? Comment la fait-on fructifier? Sommes-nous proactifs ou laissons-nous tout simplement des inconnus prendre les décisions à notre place? La plupart des données utilisées dans ce blogue comparent la situation au 31 décembre 2008 et celle plus récente se terminant le 31 décembre 2013.
  • Décrire une stratégie possible menant à l’émergence d’un nouveau capitalisme, animé par un « capitalien conscient et responsable », seul joueur en mesure de transformer en profondeur et de façon consistante les règles des marchés financiers et celles de la gestion de nos grandes sociétés.

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