Des banques d’ici, ni cheffes de file ni premières de classe

17 septembre 2021
Dominique Lemoine

Des États se sont donnés des cibles intermédiaires pour 2030 de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour s’approcher des cibles de réchauffement prévues pour 2050 dans l’Accord de Paris, mais les cibles intermédiaires de réduction chiffrées des banques d’ici se font attendre.

Par exemple, l’État fédéral des États-Unis s’est mouillé en 2021 avec une cible de réduction de 50 à 52 % de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport à 2005, l’Union européenne avec une cible de 55 % d’ici 2030 par rapport à 1990, même le Canada avec une cible de 40 à 45 % par rapport à 2005.

« À moins qu’il n’y ait de réductions d’envergure, immédiates, et rapides, limiter le réchauffement à 1,5 °C sera impossible », selon le secrétaire-général des Nations unies, Antonio Guterres, qui se base sur un rapport rendu public hier par l’Organisation météorologique mondiale (OMM), une agence des Nations unies.

Des exemples de cibles et des lignes directrices basées sur la science sont même préparés et donnés aux banques, entre autres par l’Accord de Paris, l’Agence internationale de l’énergie, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), la Net-Zero Asset Owner Alliance (NZAOA), la Net-Zero Banking Alliance, Principles for Responsible Banking (PRB), la Task Force on Climate-Related Financial Disclosures (TCFD) et laScience Based Targets initiative (SBTi).

Banques avant-gardistes

Malgré tout, aucune banque du Canada n’apparaît dans la liste des membres de la Net-Zero Banking Alliance, un regroupement formé par l’ONU de banques qui s’engagent à se donner des cibles pour 2030 à l’intérieur des premiers 18 mois de leur appartenance au groupe.

De plus, la Banque Canadienne Impériale de Commerce (CIBC), la Banque de Montréal (BMO), la Banque de Nouvelle-Écosse (Scotia), la Banque Royale du Canada (RBC) et la Banque Toronto-Dominion (TD) n’ont pas encore de cibles intermédiaires de réduction pour 2025 ou 2030, selon la liste de l’organisation BankTrack, contrairement à Barclays, Crédit Mutuel, Lloyds, NatWest et Nordea.

Par exemple, la banque finlandaise Nordea s’est engagée à réduire de 50 % les émissions générées par ses opérations à l’interne d’ici 2030 par rapport à 2019, ainsi qu’à réduire de 40 à 50 % les émissions générées par les entreprises de son portfolio de prêts et de placements pour 2030 aussi.

À la mode de chez nous

La Banque Royale du Canada sest engagée en février 2021 à réduire de 70 % ses propres émissions, sans préciser en quelle année et par rapport à quelle année, ainsi qu’à se donner des objectifs intermédiaires pour réduire les émissions découlant de ses activités de financement, ce qui n’est pas encore fait.

La Banque de Montréal affirmait en mars 2021 s’engager à réduire les émissions générées par ses propres activités de 30 % d'ici 2030 par rapport à 2019, 20 % de moins que Nordea, ainsi qu’à atteindre la « carboneutralité » de ses prêts d'ici 2050 et à établir pour ses prêts des cibles intermédiaires pour 2030, ce qui n’est pas encore fait.

La Banque canadienne impériale de commerce ne mentionne pas les énergies fossiles dans son communiqué du 26 août 2021 sur sa cible de « carboneutralité ». Elle se contente de dire qu’elle atteindra la « carboneutralité » de ses propres activités en 2024, puis celle de ses prêts et de ses placements en 2050. Elle affirme avoir l’ambition d’atteindre des émissions « nettes nulles » pour ses activités d’exploitation et de financement d’ici 2050, et de « soutenir les clients dans la transition vers une économie à faibles émissions de carbone », notamment grâce à un « écosystème de compensation ».

Flous artistiques

Selon BankTrack, des engagements manquent de détails sur comment l’objectif sera atteint et parlent d’émissions « nettes » plutôt que de réductions des émissions auxquelles les banques contribuent. Cela peut signifier un « recours excessif à la capture et au stockage de dioxyde de carbone, ou à des procédés de compensation discrédités ».

Pour pouvoir atteindre les objectifs de 2050, selon BankTrack, il n’existe pas de substitut à l’adoption de politiques strictes de financement des énergies fossiles, ni de moyen autre que de cesser tout de suite de financer les énergies fossiles et leur expansion.

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