Jacques Parizeau
(1930-2015)

Ils ne sont pas légion ceux ou celles qui dans l’histoire d’un peuple impriment leur marque pour les vivants et pour la suite de leur monde. Jacques Parizeau est de ceux-là. Nous lui sommes redevables en tout ou en partie des outils économiques qui forgent le destin de notre collectivité nationale.

Frère Jacques ne s’est jamais endormi. Il a construit tout cela dans la patience des jours recommencés, la fidélité à une grande œuvre et une inébranlable ténacité, accueillant les victoires et les défaites, ces deux menteurs dit Kipling, que « l’on reçoit du même front » si l’on veut devenir un homme.

Jacques et moi étions membres du club distingué et vénérable des octogénaires. À cet âge où le bruit des luttes et des fureurs s’éloigne pour faire place à l’enivrant silence des sommets d’où l’on peut voir les plis tourmentés des routes et des fleuves.

La nuit où René Lévesque a rendu l’âme à l’hôpital, nous étions lui et moi discrètement retranchés dans une chambre, retenant notre immense chagrin. Je lui dis un vers du Chant des partisans que René aimait : « Ami, si tu tombes un ami sort de l’ombre à ta place ». Jacques a pris le flambeau. Il nous a enseigné la ferveur et guidé notre peuple à la lisière même de la terre promise. Pour cela et pour tant de choses la patrie québécoise lui sera éternellement reconnaissante.

Je lui souhaite, là où il reposera, que « l’aurore aux doigts de roses » ouvre enfin la porte d’un jour qui verra la concrétisation de ses luttes, de ses combats, et du statut dont il a rêvé pour le Québec.


Yves Michaud

Quelques heures après le départ de Monsieur de la terre des hommes qu’il a magnifiquement enrichie de sa présence.

Montréal, le 3 juin 2015

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