Une occasion qui doit être saisie

2017-11-17
Louise Champoux-Paillé

Scrutant avec passion les projets de loi concernant la gouvernance et la représentation féminine depuis plusieurs années, un article du projet de loi 141, portant sur l’encadrement du secteur financier au Québec, a retenu particulièrement mon attention :

« Un assureur autorisé du Québec doit appliquer une politique visant à favoriser, notamment, l’indépendance, la compétence et la diversité des membres de son conseil d’administration et des comités constitués en son sein. »

Cet article est également répliqué pour les fiducies et les fédérations. Une orientation décevante qui ne va pas assez loin étant donné le caractère précurseur du gouvernement québécois en matière de parité dans les lieux de pouvoir.

Rappelons à cet égard qu’en 2007, le gouvernement de l’époque adoptait la Loi sur la Gouvernance des sociétés d’État qui reconnaissait l’importance d’une plus grande participation des femmes aux instances décisionnelles, notamment en s’assurant que les conseils d’administration de l’ensemble des sociétés d’État visées par cette loi soient constituées à parts égales de femmes et d’hommes. Soulignons aussi que cette reconnaissance de l’importance de la parité est également présente dans la Loi régissant les établissements de santé et de services sociaux. Ces exigences auront permis à davantage de femmes d’accéder à ces fonctions, d’ajouter de nouvelles perspectives à la prise de décision, et ce, sans compromis sur la qualité des administrateurs.

Cette nouvelle orientation de gouvernance en matière de représentation féminine pour les institutions financières soulève une vive préoccupation. Suivant depuis trois ans les résultats de la réglementation des Autorités canadiennes de réglementation sur la divulgation des efforts pour accroître la mixité dans les sociétés cotées en bourse, j’ai pu constater que la progression de la représentation féminine dans les hautes instances est demeurée lente et que peu d’entreprises se dotent d’objectifs. Soulignant qu’il y avait eu progression, madame Maureen Jensen, présidente de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario, concluait de cette expérience de trois ans, qu’une nouvelle approche devrait être mise de l’avant si notre société souhaite corriger cette situation avant 50 ans.

Les orientations du législateur canadien dans le projet de loi C-25 qui porte notamment sur la révision de la Loi canadienne des sociétés par actions sont également décevantes. Il énonce seulement l’exigence que certaines entreprises présentent aux actionnaires des renseignements relatifs à la diversité au sein des administrateurs et parmi les membres de la haute direction.

Le Québec a été avec sa Loi sur la Gouvernance des sociétés d’État un précurseur en matière de reconnaissance d’une représentation accrue des femmes dans ses sociétés.

Cette stratégie aura permis d’accroître la qualité de la gouvernance de nos organisations par la diversité des compétences et des expériences qui viennent s’ajouter au sein de nos hautes instances, de réaffirmer le rôle des organisations en tant qu’entreprise socialement responsable et, surtout, d’utiliser tous les talents disponibles de notre société.

Le projet de loi 141 doit aller plus loin qu’une simple exigence d’adoption d’une politique de diversité. Dans un souci d’équité, et d’une meilleure gouvernance, le législateur doit s’exprimer clairement en énonçant que les conseils d’administration des institutions concernées par ce projet de loi soient constitués à parts égales de femmes et d’hommes.

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